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Les bons cabinets d’avocats généralistes n’existent pas.

La voilà, la phrase choc. « Les bons cabinets d’avocats généralistes n’existent pas. » Vous êtes peut-être intrigué, interloqué. Peut-être même que vous attendez la suite de cet article avec le couteau entre les dents, prêt à prendre publiquement la défense des sacro-saints cabinets dits « full-services ».

Seulement voilà, les (bons) cabinets d’avocats « full-services » ne sont pas véritablement « généralistes » au sens où trop d’avocats l’entendent.

Être l’avocat de tout le monde, c’est n’être le bon avocat pour personne.

Pour reprendre ce que nous disions dans notre précédent article, un cabinet ou un avocat, pour pouvoir être perçu comme la bonne solution pour un certain type de clients, doit développer des avantages concurrentiels.

Le problème, c’est que ces avantages concurrentiels sont évidemment relatifs à une typologie précise de clients (c’est-à-dire des clients possédant une caractéristique commune).

Pour prendre un exemple simple : un avocat parlant parfaitement le français et l’allemand et ayant une grande expérience des arbitrages en Afrique de l’Ouest aura un avantage concurrentiel considérable sur les autres avocats relativement à une entreprise allemande faisant face à un arbitrage en Côte d’Ivoire.

Pour autant, cet avantage concurrentiel pèsera moins lourd pour une entreprise française ayant un arbitrage dans la zone et sera nul pour une entreprise espagnole ayant une autre problématique d’arbitrage.

Pour tout type de clientèle développée au sein du cabinet, un ou plusieurs avantages concurrentiels doivent donc être développés. Bien sûr, certains peuvent et doivent être mutualisés, mais toujours est-il que vos ressources sont limitées. Par nature, vos ressources sont limitées aux avocats composant le cabinet. Il est donc très difficile, voire impossible, de développer un nombre significatif d’avantages concurrentiels à la fois.

Le résultat est simple : à trop vouloir être généraliste, on n’est le bon avocat pour personne. Il est très peu efficace de recevoir un client et de lui dire « Je fais du droit des sociétés, mais aussi du droit immobilier et un peu de droit social. Je suis le bon avocat pour vous. »

Au contraire, il sera bien plus efficace de dire « Je m’occupe aujourd’hui principalement des entreprises ayant des intérêts en Allemagne et en Afrique de l’Ouest », ou bien « je ne fais que du droit social, principalement axé sur votre type de PME ».

La réalité est qu’il est bien plus facile, et donc bien plus efficace, d’être le meilleur avocat pour un petit nombre de personnes que pour l’ensemble d’un marché. D’ailleurs, contrairement à ce qu’on pourrait croire, les grands cabinets d’avocats « full-services » l’ont bien compris.

Par exemple, si vous entrez chez Gide parce que vous êtes un dirigeant de PME souhaitant réduire la pression fiscale sur votre entreprise, il est très peu probable qu’on vous réponde : « Bien sûr, nous avons plein d’avocats généralistes prêts à vous aider. » On vous répondra plutôt : « Bien sûr Monsieur, nous avons le spécialiste qu’il vous faut. »

La stratégie des niches

Oui, il existe de bons cabinets « full-services », mais ceux-ci ne sont pas généralistes, ils sont multi-spécialistes.

Bien sûr, être multi-spécialiste et être capable de capter un nombre très important de dossiers différents peut être extrêmement efficace et donc être un objectif pour bon nombre de cabinets d’avocats. Mais, paradoxe oblige, développer un vrai cabinet « full-service » demande d’abord de se spécialiser sur une niche et d’opter pour une stratégie bien connue du monde de l’entreprise, la stratégie des niches.

La stratégie des niches, que vous pouvez aussi retrouver sous le nom de stratégie de concentration ou de focalisation, consiste, comme son nom l’indique, à sauter de niche en niche. Au lieu d’adresser directement tout le marché, vous allez d’abord vous spécialiser sur une partie bien précise de la clientèle, avant de l’élargir progressivement pour finalement arriver en position d’adresser tout le marché.

Savez-vous ce que faisait Amazon à ses débuts ? Amazon était spécialisée dans la vente en ligne des livres rares que l’on ne trouve pas en libraire. La firme était donc un acteur incontournable et évident pour tous les doctorants et chercheurs cherchant à se procurer des livres particuliers. Une fois ce marché de niche totalement investi, Amazon a élargi son ciblage en devenant « la plus grande librairie du monde » et en vendant tous les livres. À la suite de quoi, la dynamique s’est poursuivie avec l’élargissement à tous les biens culturels. Jusqu’à arriver à la situation actuelle où vous pouvez tout trouver sur Amazon et où la firme vend également des abonnements ou encore du stockage de données.

Ainsi, même si votre ambition n’est pas de créer un géant comme Amazon, il est capital de vous spécialiser dans un premier temps. Vos ressources sont limitées, vous devez donc trouver un marché suffisamment petit pour pouvoir y être incontournable, mais suffisamment grand pour pouvoir y trouver de la croissance et commencer à y faire vivre le cabinet.

Comment faire ? En réalité, il existe deux grandes méthodes :

La première consiste à partir de son profil personnel. Demandez-vous quel pourrait-être votre avantage concurrentiel. Qu’avez-vous que la plupart des autres avocats n’ont pas ? Une langue, une expertise, un réseau … ? Ensuite, à partir de cet élément de différence, faites-en un avantage concurrentiel en trouvant la typologie de clientèle chez qui il pourrait faire la différence.

La deuxième consiste à développer une première clientèle, de manière assez large, grâce à votre expertise de départ. Ensuite, à partir de cette clientèle, réfléchissez aux clients que vous préférez, à ceux qui sont les plus rentables pour vous, à ceux pour qui vous apportez le plus de valeur ajoutée. Enfin, concentrez-vous sur ces clients et sortez progressivement les autres.

Arrivé à ce stade, vous avez défini votre première niche. Loin d’être un endroit exigu et reclus, il s’agira en réalité de votre meilleure rampe de lancement. Investissez cette niche tant que vous avez une croissance forte. C’est ce qu’on appelle une traction. L’avantage est que, plus on est connu sur une niche, plus la croissance est forte.

Seulement, celle-ci va finir par plafonner, justement parce que c’est une niche. À partir du moment où il devient plus difficile d’obtenir de nouveaux clients parce que leur nombre est limité (et que, bien souvent, des concurrents sont également présents), élargissez-vous légèrement, mais pas n’importe comment.

Choisissez une autre niche plus large, incluant la vôtre ou étant très proche de cette dernière. Par exemple, après les livres rares, Amazon a choisi les livres, puis les biens culturels. Vous pourrez ainsi réutiliser les actifs que vous avez développés sur votre première niche : votre réputation, votre expertise et le réseau de vos clients. L’idée est d’élargir la niche quand il devient plus rentable de le faire plutôt que de persister uniquement sur l’ancienne.

Conclusion

Non seulement les bons cabinets d’avocats généralistes n’existent pas, mais surtout les cabinets « full-services » ne se sont pas construits en un jour. Les bons cabinets d’avocats « full-services » sont en réalité multi-spécialistes, et possèdent une multitude d’expertises spécifiques à même de satisfaire parfaitement tout type de client.

Ces cabinets ne se bâtissent pas en un jour. Le processus est long, technique et doit être abordé avec une grande précision stratégique. D’autant que, rappelons-le, le cabinet « full-service » n’est pas la seule trajectoire stratégique possible. De grandes choses peuvent en effet être entreprises dans le but de construire et de garder un cabinet de niche, ou du moins spécialisé.

Si vous vous voulez aller plus loin dans ces questions, nous y accordons une place de premier plan dans le premier module et le deuxième module de :

La Formation Boost, pour les collaborateurs et avocats individuels.La Formation Business Partner, pour les avocats associés de cabinet d’affaires.

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